D’emblée, l’idée de dictature évoque un régime politique dont l’autorité s’appuie la plupart du temps sur une seule personne. Depuis à peine deux siècles, ce pouvoir s’érige parallèlement aux régimes démocratiques qui reposent, en principe, sur les libertés fondamentales garanties par l’État. Mais il faut aussi rappeler que cette notion de dictature ne se contente pas d’une seule vision autoritaire. En souhaitant renverser l’injustice causée par les privilèges de classes, Karl Marx envisageait la dictature du prolétariat comme un passage obligé afin de parvenir à un monde commun plus juste et plus équitable. D’autres, de nos jours, devant l’urgence de stopper radicalement le réchauffement climatique, se demandent s’il ne faudrait pas en arriver à un écologisme imposé afin de remédier au laxisme des régimes démocratiques incapables d’accélérer le processus au détriment de nos libertés de consommateurs.
Dictatures
Des dictatures au temps du néolibéralisme
Pratiques du dissensus : notes sur l’esthétique conflictuelle
Si, en tant que régime politique, la dictature se trouve bien à l’opposé de la logique démocratique, l’évocation d’une certaine dictature au sein même de cette dernière renvoie à l’idée d’un pouvoir coercitif implicite sur la population. Ceci est d’autant plus effectif qu’un tel pouvoir fait l’objet d’un large consensus qui néglige et, par le même mouvement, étouffe les voix contraires. C’est bien ce qu’Alexis de Tocqueville, lors de sa découverte du fonctionnement social et politique en Amérique, identifiait avec la « tyrannie de la majorité », à savoir une forme de conformisme intellectuel établie par un groupe majoritaire qui pèse sur une ou des minorités au sein d’un système démocratique.
Contemporary Art “At Work” in the Interstices of Post-Democratic Dictatorships
After the fall of the Berlin Wall in 1989, the ideological separation between East and West determined a configuration of liberal democracy as a political doctrine that established a post-ideological consensus of polic(y)ing rather than politicizing, in which the dictatorship of the market replaced politics as a decision making space. This post-ideological consensus—constituted as a denial of any politics of difference, ignoring freedom and dismissing any dissenting position— revels in the inherent authoritarianism of capitalism. The post-political order of polic(y)ing withdrew politics from the social space and substituted the public sphere—as a space for political dissensions—with systems of social regulation such as the police and the local administration.
La résistance artistique en Europe centrale et le phénomène de la post-démocratie
Certains gouvernements des pays de l’Est appartenant à la Communauté européenne, dont la Hongrie, la Pologne, la Roumanie et la Slovaquie, restreignent de plus en plus la liberté d’expression. Ces pays, qui ont été sous le joug des nazis puis des Soviétiques, se sont ouverts à la démocratie il y a plus de 30 ans, un critère pour leur appartenance à l’Union européenne. Mais ils se trouvent aujourd’hui face à une situation politique qui n’est pas sans rappeler leur passé d’avant la chute du mur de Berlin. En effet, depuis l’ouverture à la démocratie en 1989, puis le rejet des valeurs de l’Europe dans les années 2000, plusieurs gouvernements reviennent à une attitude ancrée dans un discours à saveur hégémonique prônant une attitude raciste et souhaitant la fermeture des frontières.
Écritures de la non-histoire : dictatures latino-américaines et responsabilité citoyenne dans l’oeuvre de Voluspa Jarpa
Le 16 octobre 1998, le général chilien Augusto Pinochet, dictateur à la tête de son pays entre 1973 et 1990, est arrêté à Londres. L’année suivante, sous la pression de l’opinion publique internationale, les États-Unis décident de déclassifier des milliers de documents concernant le coup d’État de 1973 et les années sanglantes de répression qui s’en sont suivies. Le Chile Declassification Project, déclassification inédite d’archives appartenant au Département d’État étasunien, à la CIA, aux Archives nationales, au FBI et au Département de la défense, a été l’un des premiers d’une série de projets de declassification diplomacy dans le pays, une politique formulée pendant la présidence de Bill Clinton et poursuivie par les gouvernements subséquents.
Pour en finir avec la dictature du “toujours plus ” : l’art de la décroissance
Force est de constater que notre logique acharnée du « toujours plus » ne fonctionne pas1, que l’idée qui veut que plus équivaut à mieux est fausse, que la dictature de la croissance illimitée nous mène droit dans le mur, qu’il faut abandonner ce dogme et trouver des solutions de rechange. Compte tenu de l’état d’urgence climatique et sociale qui ne laisse plus personne – ou presque – indifférent, l’idée de la décroissance, considérée comme utopique et radicale il n’y a pas si longtemps, occupe une place des plus importantes parmi celles qui cherchent à penser le futur autrement. Un futur dans lequel notre société consumériste et productiviste, gouvernée par le dictat de la croissance à tout prix, aurait laissé place à une société dans laquelle la décroissance, loin de rimer avec déclin et de susciter craintes et méfiance, serait devenue souhaitable et nécessaire.
La dictature des chiffres : un entretien avec Julien Prévieux
Lauréat 2014 du prix Marcel Duchamp décerné par l'association pour la diffusion internationale de l'art français, en partenariat avec le centre Georges-Pompidou, Julien Prévieux expose depuis la fin des années 1990. Sous diverses formes - vidéos, sculptures, installations, performances, dessins - ses oeuvres soulèvent surtout des questions relatives aux figures du pouvoir et aux processus de contrôle et de quantification agissant au sein de notre société ordonnée par les sciences et les technologies.
Our Happy Life: an interview with Francesco Garutti
First presented at the Centre for Canadian Architecture (CCA) in 2019, Our Happy Life is the outcome of in-depth research on the modalities and consequences of the exponential quantification of happiness in the context of late capitalism. The exhibition examines the influence of criteria and vectors of well-being on personal and social levels, as well as in urban planning and architecture. To highlight some of the key issues raised by this tentacular project, we discussed with its initiator, CCA's curator of contemporary architecture Francesco Garutti.
Dictatorship Contra Critique
We are confronted, today, by the very real prospect of a return to dictatorship. This means the preponderance of a state’s executive arm unshackled by the rule of law, balanced and checked neither by judicial and legislative branches of government, nor by a free press. Such a pre-eminence of executive authority once characterized the feudal order in which kings (and queens) were assumed to possess a “divine right to rule.” The prospect of its return is becoming truly global in scope. From eastern Europe through Turkey to India and beyond, the possibility of undisguised and unfettered assertion of sovereign power is unmistakable.
Transits and Returns
An exhibition can be a presentation of artworks from different places that connect ideas together in a gallery space for visitors. More powerfully, as with Transits and Returns, it can also be a deeply transformative process for all who are involved: a small revolution towards self-determination, sovereignty, and collective liberation, effects which are also felt on encountering its final form. Three years ago, the exhibition began as conversations between curators from the settler colonial nation states of Aotearoa New Zealand, Australia, Canada and the USA—Sarah Biscarra Dilley, Freja Carmichael, Leuli Eshragi, Tarah Hogue and Lana Lopesi—who recognized the Great (Pacific) Ocean between their territories as not neutral, but rather a culturally and politically charged expanse, fluidly connecting different cultures across generations and millennia.
Àbadakone | Feu continuel : art contemporain indigène international
En 2013, l’exposition Sakahàn, un terme qui signifie « allumer le feu » en algonquin, fut une étincelle qui provoqua de nouveaux échanges féconds quant à l’expérience plurielle de l’autochtonie sur le plan international. Depuis novembre 2019, le Musée des beaux-arts du Canada propose une seconde édition intitulée Àbadakone | Feu continuel réunissant plus de 70 artistes appartenant à 40 nations, tribus et ethnies de 16 pays. Les conservateurs du musée (Greg A. Hill, Christine Lalonde et Rachelle Dickenson) proposent un format d’exposition dynamique incluant des œuvres se déployant dans une diversité de médiums, dont des installations monumentales et des performances, qui soulignent l’importance de l’agentivité des artistes, mais aussi de l’engagement du spectateur dans la mise en place de relations porteuses pour l’avenir.
Anna Katharina Scheidegger, From glaciers with love
À l’invitation de l’association la Lune en Parachute, l’artiste suisse Anna Katharina Scheidegger investit la Plomberie, à Épinal, d’où elle envoie une carte postale grave et sensible, un baiser glacé From glaciers with love. Omniprésent, ledit glacier gronde et s’impose dans tout l’espace d’exposition à travers un ensemble d’œuvres politiques et poétiques qui témoignent de sa disparition annoncée.
Anouk Verviers, Au milieu des bureaux empilés
Tout à la fois relationnel, politique et conceptuel, le travail d’Anouk Verviers constitue sans nul doute une manifestation exemplaire de ce qu’il faut bien appeler un « art de la conversation », avec tout ce que cette veine d’art contemporain peut avoir, aujourd’hui, de riche et de complexe. Au milieu des bureaux empilés, exposition qu’elle présentait l’automne dernier à Regart, s’inscrit de belle manière dans ce champ d’activité tant sa contribution y apparaît forte et significative.
Christopher Kulendran Thomas (in collaboration with Annika Kuhlmann), Ground Zero
A large transparent screen sections the rotunda of the Schinkel Pavillon and encases, in a glass-like vitrine, a series of paintings and sculptures by two prominent artists from Sri Lanka: Upali Ananda and Kingsley Gunatilake. The main function of this partition, however, is to act as a projection wall for Christopher Kulendran Thomas’s video Being Human. The viewer is propelled through a rhythmic sequence of images from various sources such as stock photographs, filmed footage, landscape shots, and so on.
Bertrand Lamarche, Ellipse
Pour sa troisième exposition personnelle à la galerie Jérôme Poggi, Bertrand Lamarche explore la face cachée de nos agglomérations urbaines tentaculaires à partir du panorama de la ville de Nancy, marquée depuis les Trente Glorieuses par un urbanisme de barres et de tours, ces impasses verticales qui constituent la pierre angulaire du modernisme architectural.
Emmanuelle Léonard, Le déploiement
La Galerie de l’UQAM présentait récemment une exposition d’œuvres inédites de l’artiste québécoise Emmanuelle Léonard, commissariée par Louise Déry. Réalisées dans le Grand Nord canadien, les projets photographiques et vidéographiques de l’artiste étaient rassemblés sous le titre Le déploiement. Léonard a amorcé le corpus d’œuvres en 2018 dans le cadre d’une résidence de recherche au sein du Programme d’arts des Forces armées canadiennes.
Jocelyn Philibert, Dimension Lumière
A sustained focus on trees has been at the centre of Jocelyn Philibert’s photographic practice for over fifteen years. After a long period of exploring sculpture and installation, the artist chose photography in 2006 as his principle medium and the tree as his main subject. He first created a set of remarkable works depicting trees in nocturnal settings and then towards 2016 he turned his attention to depicting trees and figures in daylight with the Au jardin des possibles series. Dimension Lumière, presented by EXPRESSION, is the first time that selected works from these two series are brought together under one roof.
Mathieu Grenier, Sans filtre
Explorant la matérialité de la photographie comme indice de son ontologie, Mathieu Grenier nourrit une pratique qui met en tension les temps et les dimensions de l’image. Ses recherches portent autant sur le caractère palpable du médium, ses techniques et ses supports que sur le moment de son exposition et de sa médiation. Il s’intéresse d’ailleurs, depuis longtemps, au contexte de l’exposition en tant que sujet et matériau, une approche qui s’est exprimée à travers plusieurs de ses corpus photographiques.
Richard Niessen, The Typotectural Suites
The Typotectural Suites (2019) reminds us that language, like architecture, is a construct. Both are assembled of multiple small components in order to serve multiple functions. The role of words, in essence, parallels that of bricks. This observation underlies Niessen’s The Typotectural Suites, which explores the relationship between letters and spaciousness, and is the latest in an ongoing series of projects conceived as part of his “Palace of Typographic Masonry”, an (imaginary) institute dedicated to the splendour and variety of graphic languages.
Nicolas Grenier, Positions
Le 24 janvier 2020, un événement a marqué la vie artistique à Montréal. Deux galeries privées d’envergure internationale (Parisian Laundry et Antoine Ertaskiran) ont fusionné pour ne former qu’une seule et même entité : la galerie Bradley Ertaskiran, située en lieu et place de l’ancien Parisian Laundry. Afin d’inaugurer ce nouvel espace culturel, une soirée de lancement a été organisée. Dans ce contexte, l’une des deux expositions présentées a retenu notre attention, à savoir l’exposition Positions de Nicolas Grenier.
Mathieu Cardin, What the Frog’s Eye Tells the Frog’s Brain
In 1959, researchers at MIT published a risky but ultimately much-celebrated paper, “What the Frog’s Eye Tells the Frog’s Brain,” on the function of the frog’s optic nerve. Led by cognitive scientist Jerome Lettvin, the researchers proposed that the frog’s optic nerve, previously thought simply to transmit light stimuli to the brain, was in fact a far more complex organ capable of sophisticated interpretive functions. Mathieu Cardin’s exhibition at Vox takes its title from this paper, implicitly placing the visitor in the role of the frog—our eyes racing well ahead of our brains.
Althea Thauberger, The State of the Situation
Vancouver-based artist Althea Thauberger makes photographic and video works that examine how institutional communities (in the shape of institutions, governments and other agents of society) circumscribe public action, and how publics (in the shape of collaborative communities) can counteract the centralizing forces at play in any cultural structure. Through her critical approach to documentary methods, she creates unique interventions into history and works collaboratively with diverse communities to help them create their own expressions of their historical moments.