La décentralisation est célébrée. Mais de quoi s'agit-il vraiment ? Dans un sens strict, l'anniversaire d'une loi : celle du 2 mars 1982 relative aux droits et aux libertés des régions, des départements et des communes. Le candidat à la présidence de la République, François Mitterrand, avait promis une politique de décentralisation dès 1980, le Premier ministre Pierre Mauroy l'avait annoncée le 29 mai 1981, le ministre de l'intérieur, Gaston Defferre, l'avait élaborée, à travers une série de mesures législatives et administratives, entre 1981 et 1983.
La décentralisation
La décentralisation, dix ans après
La République des fiefs
Les réformes impulsées par Gaston Defferre à partir de 1981 sont parmi les plus intelligentes qu'il ait été donné d'observer au cours de la dernière décennie. Entendons-nous bien : en prononçant ce jugement nous ne nous plaçons pas du point de vue du contenu des réformes, mais de la stratégie que ses promoteurs ont consciemment développée. Indépendamment de l'opinion que chacun peut avoir des mérites et des tares des lois de décentralisation auxquelles le ministre de l'intérieur a laissé son nom, il apparaît clairement que les objectifs fondamentaux des promoteurs de la réforme ont été atteints : en 1992, dix ans après l'adoption du premier texte fondateur, nul ne discute plus de l'accroissement réel des compétences, des ressources, bref de l'autonomie des collectivités locales.
L’opinion et la décentralisation ou la décentralisation apprivoisée
La décentralisation, l'une des grandes réformes du premier septennat de F. Mitterrand, marque, en fait, l'aboutissement d'une affaire qui aura pris plus d'un demi-siècle de valse-hésitation entre déconcentration et décentralisation, de chasses-croisés entre la droite et la gauche. Fait remarquable, sur une question qui modifie radicalement les relations entre l'Etat et la société, le dossier aura été traité, de bout en bout, sur un plan technique à coups de discussions entre le Gouvernement, des bureaucrates, des élus locaux et des scientifiques en dehors des citoyens, alors même que certains sociologues et élus défendent la cause de la décentralisation au nom d'une conception plus participative de la vie politique.
L’imbrication des pouvoirs, limite pour la démocratie
La décentralisation est désormais assez ancienne pour qu'une analyse objective de ses réussites et de ses limites puisse être tentée, de manière à déterminer dans quelle mesure les lois adoptées auront réellement changé les structures administratives que nous avons héritées de tant de siècles de centralisme. Il n'est pas évident, en effet, que le bilan actuel de la décentralisation réponde aux attentes qu'avait fait se lever le projet décentralisateur : il importe de s'interroger sur la nature des obstacles qui ont été rencontrés, sur la nature des résistances qui sont apparues, et de prendre nettement conscience des mécanismes politiques qui ont remplacé les anciennes habitudes.
Région, département, commune : le faux débat
L'année 1992 constitue un tournant pour l'Europe, la mise en œuvre de l'Acte unique se télescope avec l'accession à l'indépendance d'un second bloc d'entités territoriales à l'est, et avec un réveil des nationalités sans précédent qui peut tantôt conforter, et tantôt mettre en péril, la constitution de régimes démocratiques dans ces pays.
L’élu local : nouveau professionnel de la République
Tous les élus, parfois avec regret, tous les analystes aussi soulignent à l'envi la professionnalisation du « métier politique » local qu'on impute ordinairement à la décentralisation ou qui l'aurait au moins singulièrement renforcée. Il est vrai que la décentralisation a marqué « le sacre des notables » et fait d'eux les véritables responsables du système politico-administratif local, en leur accordant le pouvoir de décision autrefois réservé aux agents de l'Etat et en attribuant des compétences spécifiées aux collectivités dont ils ont désormais la maîtrise.
L’introuvable Fonction publique territoriale
Durant la dernière décennie, les tâches exercées par les communes se sont considérablement étendues et diversifiées. On a coutume de dire qu'une grande ville compte jusqu'à 300 métiers : puéricultrice, architecte, informaticien, paysagiste, thermicien, spécialiste de la circulation, manager du développement économique... La décentralisation a provoqué un véritable bouleversement dans les départements et les régions. Les transferts de compétences préalablement exercées par l'Etat, de même que l'attribution de nouvelles responsabilités aux élus locaux ont secoué les habitudes de plus d'un million d'agents des collectivités territoriales devenus fonctionnaires territoriaux.
L’émiettement communal et la fiscalité
L'exceptionnelle densité du maillage territorial constitue de l'avis général un obstacle majeur à la réforme pourtant si nécessaire de la fiscalité locale en France. L'impossibilité de mener à bien la révision de la carte des territoires expliquerait ainsi pourquoi l'édifice construit à partir des lois de décentralisation ne comportait aucun volet fiscal substantiel.
Les interventions économique locale
Le domaine des interventions économiques est sans doute le meilleur révélateur de la complexité des changements entraînés par la décentralisation. Avec le recul qu'autorise une décennie de mise en œuvre des lois de 1982, on commence à prendre conscience que, si la décentralisation a effectivement bouleversé le fonctionnement des collectivités locales françaises, les changements n'ont pas pris exactement la forme escomptée au moment de la réforme. D'un côté, un certain nombre d'illusions sont tombées, concernant la capacité des collectivités locales à promouvoir l'emploi ou à renforcer la participation des citoyens. Mais de l'autre, on assiste à une transformation en profondeur du paysage politico-administratif local, avec des retombées très importantes sur la vie politique locale et l'action de l'administration.
Les contrôles sont-ils efficaces ?
A l'occasion des débats parlementaires, le nouveau mode de contrôle de légalité des actes locaux avait suscité chez les élus la crainte d'une « tutelle des juges » . Le Ministère de l'Intérieur, une partie de la doctrine et les membres des juridictions administratives soulignaient au contraire l'importance de la mission dont ces dernières étaient investies, en même temps que s'exprimait la crainte d'une explosion du contentieux à laquelle elle n'aurait pu faire face.
Le contrôle financier des Chambres régionales des comptes
Il est certainement encore un peu tôt pour porter une appréciation exhaustive sur la valeur et la portée du contrôle financier exercé par les Chambres régionales des comptes (CRC), au regard notamment de son efficacité. Pour une raison simple : ce contrôle financier est encore en train d'évoluer, et certainement dans le sens d'un élargissement.
La décentralisation française et l’Europe
Si 1992 marque le dixième anniversaire des premières lois de décentralisation, il est beaucoup plus synonyme encore, pour beaucoup de Français, d' « échéance européenne ». Il était donc tentant d'opérer un rapprochement entre ces deux événements symbole. L'Europe intéresse, de fait, la décentralisation, de manière directe ou indirecte, à plusieurs niveaux : les collectivités territoriales sont désormais des sujets de droit européen, des partenaires, même, de mieux en mieux reconnus de la Communauté européenne. Nombre de collectivités les plus importantes de notre pays ne s'y sont pas trompées qui ont installé à Bruxelles, à l'instar, par exemple, des Länder allemands, de véritables antennes, à mi-chemin de l'office de tourisme et du cabinet de lobbying.
Pour une histoire des idées constitutionnelles
Proposer cette sorte de profession de foi à des constitutionnalistes, de la part d'une constitutionnaliste, est un exercice périlleux. En effet, ce public à qui l'on parle et celle qui parle tempèrent la valeur objective du manifeste puisque par hypothèse tous les deux peuvent être convaincus de la nécessité d'une telle revendication. Il est possible même que certains la jugent inutile parce qu'ils connaissent et pratiquent cette histoire.
La guerre du Golfe et le syndrome vietnamien
Maintenant que le défilé triomphal de la victoire est terminé et que le général Schwarzkopf a signé un contrat pour écrire ses mémoires, la principale question qui reste posée à propos de la guerre du Golfe est de savoir dans quelle mesure son souvenir va continuer à influencer la politique étrangère américaine. Le président Bush a ouvert ce qui ne manquera pas d'être un débat prolongé aux Etats-Unis quand il a déclaré dans son discours annonçant le cessez-le-feu : « Nous nous sommes débarrassés du syndrome vietnamien une fois pour toutes. » Nous voulons dans cet article analyser ce que l'on appelle le « syndrome vietnamien », voir si l'on s'en est effectivement « débarrassé » ou si on l'a enterré dans le sable du Golfe, et évaluer les possibles effets futurs de ce qui va peut-être devenir le « syndrome du Golfe ».
L’Italie à la recherche de son “Algérie ”
Ce sont désormais tous les partis politiques italiens qui demandent que l'on change la forme de Gouvernement de la République. Le chef de l'Etat l'a lui aussi demandé dans un message fort controversé et discuté par le Parlement les 23-25 juillet 1991.