Le beau jeu de mots. C’est Godard qui parle . Il est vrai que, mentionnant le dieu de la mélancolie, il n’a pas du tout l’intention d’invoquer la mélancolie elle-même – il fait allusion à un aspect dévorant de Resnais, comme d’ailleurs des autres cinéastes de la Nouvelle Vague, qui ne se forgeaient un style individué d’auteur qu’en se nourrissant de ceux qui les entouraient.
La Nouvelle Vague dans l’oeil des philosophes
Mélancolie de la Nouvelle Vague
Des idées vagues avec des images claires
Longtemps je me suis gardée de revoir les films de la Nouvelle Vague qui, pour évoquer sans détour quelque jeunesse intemporelle, risquaient d’éveiller en moi le souvenir de celle qui nous était restée dérobée. La nostalgie d’une jeunesse confisquée pour notre temps, face au spectacle de cette autre jeunesse, indéfectiblement libre dans cette jubilation supérieure, cette nostalgie ne pouvait qu’avoir été projetée sur l’écran d’une vision altérée par quelque surimpression du moment. Pourtant, si les films venaient à résister à cette surimpression, la question demeurait de savoir si quelque chose n’y disposait pas comme par anticipation : pourquoi Les 400 coups m’avait-il semblé paradigmatique d’une enfance rêvée, de l’insouciance qui s’ignore jusque dans son apogée, quand, à le revoir, la jubilation, si absolue, ne pouvait dissimuler la part sombre et comme son revers véritable ?
Les absences de la Nouvelle Vague
Dans Histoire d’eau (12 minutes – 1958), une jeune fille brave les inondations pour regagner Paris et assister à ses cours à l’université. Tandis que les obstacles se multiplient, elle sympathise progressivement avec le jeune homme (Jean-Claude Brialy) qui l’a prise en stop. Ce court film présente de nombreuses aractéristiques qui font de lui un bon représentant de la Nouvelle Vague.
De la politique des auteurs à la Nouvelle Vague
La question qui est ici en jeu est celle du rapport entre la théorie et la pratique. On sait que la plupart des cinéastes de la Nouvelle Vague ont d’abord été des critiques de cinéma, notamment dans la revue Les Cahiers du cinéma et dans le magazine Arts : Truffaut, Godard, Rohmer, Rivette, Chabrol… Il faut se souvenir que dans les années 50, la critique de cinéma avait une autre tenue qu’aujourd’hui, à raison même de la qualité de ces noms —mais il ne s’agit pas tant d’une question d’intelligence ou de culture que d’une question de point de vue sur la critique : en faisant de la critique, ils se posaient avant tout en théoriciens du cinéma, à l’école, en cela, d’André Bazin.
La Nouvelle Vague et l’avenir de la dérision
J’aimerais proposer une exploration de la Nouvelle Vague dans l’oeil de deux philosophes : Gilles Deleuze et Jacques Rancière, qui présentent respectivement deux pensées très différentes à cet égard ; différentes à plusieurs niveaux, mais qui peuvent toutefois se recouper sur un problème précis que nous rencontrerons en conclusion de cette brève étude.