Tiago Rodrigues

Un humaniste à Avignon

Après avoir quitté la direction du théâtre de Lorient où Simon Delétang lui a succédé, Rodolphe Dana re- trouve le plaisir de la vie en compagnie. Exit Les Possédés le collectif qui les a fait connaître, il a créé avec Katja Hunsinger La Yanua Compagnie et ensemble ils montent au Théâtre du Peuple de Bussang la pièce emblématique du théâtre français Cyrano de Bergerac. Un monument dont il joue lui-même le rôle titre.

Pour leur vingt-cinquième anniversaire, les Rencontres internationales de théâtre en Corse verront jouer professionnels et amateurs du monde entier autour d’un programme festif. Au cœur du Parc naturel régional de Corse, le festival veut promouvoir une révolution esthétique, écologique et politique de l’art scénique.

C’est Jérôme Deschamps l’artiste à l’honneur au Château de Grignan cet été. Durant les deux mois que dure le festival, il reprend L’Avare qu’il a créé au TNP en octobre der- nier et dont il joue le rôle-titre, Harpagon. Le spectacle semble avoir été pensé pour Grignan, le plateau vide, juste habillé d’une peinture abstraite, devrait se marier au décor naturel de la façade du château où se jouent les spectacles. Pour l’ex-Deschiens, cette sobriété sert à faire réentendre la pièce de Molière et comprendre qu’Harpagon gère avant tout les intérêts de ses enfants.

Julie Depardieu s’empare d’un texte dur, âpre, dérangeant de Christian Siméon qui a imaginé les lettres de Magda Goebbels, de son adolescence à sa mort dans le bunker d’Hitler le 1er mai 1945, en passant par le moment où elle fut l’égérie du IIIe Reich, incarnation de la femme aryenne.

Comédien et marionnettiste, cofondateur avec Estelle Charlier de la compagnie La Pendue qui a inventé le personnage d’An- nette du film de Leos Carax, Romuald Collinet s’est créé un avatar sur scène qu’il appelle La Figure du fou et auquel il doit quelques-uns de ses succès comme Poli Dégaine créé pour le centenaire de Polichinelle ou Tria Fata. Il y a quelque temps il se frotte à Shakespeare dont il monte Roméo et Juliette et dé- couvre la force d’interprétation du dramaturge anglais. Il y re- tourne cet été avec Hamlet, dans une version très “catch” de la tragédie du prince danois, Hamlet mania.

Dans Copenhague, pièce écrite en 1998 et récompensée par un Tony Award, Michael Frayn essaie de reconstituer la teneur de la rencontre en 1941 au Danemark des physi- ciens Werner Heisenberg et Niels Bohr. Les deux hommes se connaissent, le premier, cofondateur de la mécanique quantique, inventeur du principe d’incertitude et Prix Nobel de Physique en 1932, ayant travaillé tout jeune pour le se- cond. Mais la guerre les a séparés. Heisenberg, resté en Al- lemagne, est alors chargé des recherches atomiques pour le IIIe Reich. Et il semble que la question de l’élaboration de la bombe déterminante pour l’issue de la guerre était au centre de la rencontre. Nicolas Vial, physicien de formation, remonte la pièce avec sa propre expertise.

Du 27 juin au 2 juillet, le Grand Parquet accueille 7 spectacles et 2 installations atypiques. Ces objets théâtraux non identifiés invitent les spectateurs à s’immerger dans des propositions courtes, originales et surtout à l’écart des ors du théâtre : une caravane, un salon de coiffure, un western, un terrain vague... Adrien de Van, le directeur du lieu, également directeur du Paris-Villette, est lui-même un adepte de ces formats.

David Geselson aime mêler la grande histoire et l’histoire individuelle. C’est ce qui ressortait notamment de sa pièce En route-Kaddish, entrelaçant l’histoire du drame israélo-palestinien à celle de son grand-père. On retrouve ce sillon dans Neandertal son nouveau spectacle, autour d’hommes et de femmes de science.

Stefan Kaegi de la compagnie Rimini Protokoll et Caro- line Barneaud du Théâtre Vidy-Lausanne réunissent sept créateurs européens dans Paysages partagés. Un spectacle de sept heures, en pleine nature qui interroge le processus créatif et invite à regarder, écouter la na- ture autrement.

La performeuse, chanteuse et musicienne électro adapte l’album culte de David Bowie en remplaçant le héros androgyne par une extraterrestre non binaire ré- fugiée au Niger. Un Ziggy Stardust afro-futuriste. Ça va secouer!

Vers 1490, à l’aube de la Renaissance Jérôme Bosch peint le triptyque que l’on nommera Le Jardin des délices. Cet été, dans cet endroit de tous les possibles qu’est la Carrière de Boulbon à quelques minutes d’Avignon, Philippe Quesne proposera un opus écrit tout spécialement pour le lieu, inspiré du célèbre primitif flamand et de son bestiaire fantasmagorique. Une œuvre qui active l’imaginaire sur notre époque.

PUNK.E.S revisite le destin éclair des Slits, groupe punk féminin méconnu. Le spectacle mêle standards punks, des Sex Pistols aux Clash en passant par les Slits, et théâ- tre pour un biopic théâtral mené pied au plancher.

L’une est jeune et jolie, l’autre, immense star, a déjà un pied dans la postérité. La première écrit sur les violences conjugales, le second en a déjà été l’auteur. Pour sa pre- mière pièce à Avignon, Cette petite musique que per- sonne n’entend, Clarisse Fontaine convainc JoeyStarr de se transformer en metteur en scène, et de défendre le droit des femmes au théâtre. Repenti, le rappeur ?

En plein tournage d’un épisode de Cassandre, la série à succès de France 3, Dominique Pinon répète La couleur des souvenirs, une tragi-comédie de Fabio Marra.