Décidément l’histoire de France radote. Voilà que le petit bonapartisme, ce virus politique que l’on croyait éradiqué depuis le désastre de Sedan en septembre 1870, a dramatiquement resurgi à la tête de l’État le 6 mai 2007. Agité nuit et jour de compulsions verbales et d’effets d’annonce, celui qui se veut le boss de la République truffe ses discours de citations que lui souffle son nègre. C’est ainsi qu’en campagne à Toulon il assaisonne sa palabre des deux derniers vers d’un poème de Victor Hugo qui, soit dit en passant, évoque la barbarie des Turcs dévastant l’île grecque de Chio.
République malade
Nicolas le petit
Herr Blabla
L'inflation du blabla médiatique devient tel que plus aucune parole n'est crédible ni tenue. Quand le blabla devient charabia, plus d'action politique cohérente. Les respublica s'efface derrière la resmediatica.
Tout est dit
Derrière les discours politiciens un sous-texte court. En lisant cette réécriture compactée de la déclaration d’intention du candidat Nicolas Sarkozy, on découvre les soubassements de sa pensée. Un comique de répétition du Je. Un esprit Matamore. Une indignation sentimentale à tous les problèmes. Une manie de lister comme si dire c’était faire. Une délire de persécution contre mai 68.
Prendre aux pauvres, donner aux riches
Des travailleurs pauvres, des précaires, la misère, des classes moyennes étranglées, des vies chiches – et le bouclier fiscal pour les riches. La bonne stratégie pour accroître encore les inégalités.
Bander contre
Pour le parvenu sidéré d’être au pouvoir, vivre, désirer, agir n’aura jamais que le goût du ressentiment. Présider est sa vengeance, éternellement inassouvie.
L’Etat c’est moi
Dès son allocution aux parlementaires de la majorité de juin 2007, Nicolas Sarkozy répète « Je » 126 fois. Devant le Medef, fin août 2007, on trouve 134 « Je » dont 55 « Je veux ». Le Roi lui-même pourtant disait « Nous voulons ». Nous avons demandé au linguiste Alain Rey, du dictionnaire Le Robert, de décrypter cette inflation.
Qui je? Moi?
Frappé par la récurrence du « Je » et du « Moi » dans les prises de parole du président de la République, Pierre-Henri Castel nous livre son analyse du phénomène.
J’ai la Berlu
Contrôle des médias et des juges, gouverner un pays comme on mène une entreprise, « enrichissez-vous » comme idéal politique, haine des « perdants », mépris des intellectuels. C’est la berlusconite. Toujours recommencée.
1000 suicidés
Nos prisons reflètent notre justice. Les prisons françaises sont une infamie. D’autres solutions à la délinquance existent, d’autres peines, le tout carcéral est une impasse.
Biométrie chérie
Les technologies policières de fichage physiologique deviennent si perfectionnées qu’elles s’exercent même à l’insu des citoyens. En manipulant la peur des gouvernés, les gouvernants s’autorisent à supprimer la liberté d’être soi-même, unique et différent.
Ordre moral, ordre cérébral?
Détection des enfants « indociles » à la maternelle, fichage ADN des petits délinquants jusqu’aux opposants aux OGM, le biologique envahit le politique, prétendant à une justification scientifique. Biocratie et technologie policière se rejoignent.
L’enfance en danger
Après guerre, un enfant en pyjama rayé semblait insupportable. On institua « la protection de l’enfance en danger ». Aujourd’hui, l’enfant de la basse classe est criminalisé, enfermé, «karcherisé». Prévention, éducation, accompagnement cèdent au tout répressif.
Né hétérosexuel et migraineux
Les tabous sexuels des dirigeants seraient sans intérêt s’ils n’étaient assortis de décisions politiques inquiétantes. Fichage génétique des familles immigrées, interdiction du mariage gay et de l’homoparentalité.
L’histrion au pouvoir
Hyperprésence, hyperactivité, hypercom, hyperspectacle, surexposition mégalomaniaque de l’acteur ivre de pouvoir surjouant son personnage jusqu’à la dérision. Tel est l’histrion politique, le roi du faux-mouvement.
Immigration : l’incohérence
Papiers, quotas, ADN, résultats… La machine à expulser grince : enfants arrachés, couples écartelés, familles démembrées, existences laminées. Entretien avec Ruwen Ogien.
Tragique rétention
Rétention, terme médical (1314) : accumulation dans une cavité ou un tissu d’une substance toxique à évacuer – rétention d’eau, oedème. Rétention administrative (2008) : retenir dans un centre un étranger en situation «irrégulière» avant de l’expulser. Entretien avec Charles Berling.
Le bouche à Bush
Deux fois, on a vu Nicolas le Petit aller lustrer les bottes du plus grand va-t-en-guerre, du plus grand pollueur planétaire, du plus grand menteur d’État, compromis avec le plus grand lobby pétrolier.
Il nous reste le rire pour pleurer
Depuis trois ans, le prix Goncourt 1997 Patrick Rambaud écrit une Chronique du règne de Nicolas Ier (Grasset) au succès considérable. Nous l’avons rencontré pour lui demander s’il dégageait quelques grands principes à l’oeuvre derrière la grande geste présidentielle. Voici son analyse grinçante.