Aussitôt revenus de Cannes, nous avons commencé à préparer ce numéro. Nous avons donc entrepris de mettre en commun ce que les uns et les autres avaient perçu de cette édition, pour dégager des lignes thématiques et construire notre bilan. Des mails ont été échangés. Les idées se percutaient, se répondaient ou se contredisaient, et tout cela prenait de plus en plus la forme d’un débat. Et il nous est apparu alors qu’il serait intéressant de restituer nos impressions directement sous cette forme dialoguée ; que ce serait le meilleur moyen de rendre compte de l’état d’esprit, bouillonnant et désordonné, de l’immédiat après-Cannes. Par un petit jeu de collage, voici reconstituée la conversation à bâtons rompus que nous aurions pu avoir autour d’une table, vers la fin du mois de mai.
Hors Série Cannes 2011
Points de vue et images du monde
Tous les films du festival
Après une sélection 2010 tiède, riche en pétards mouillés et films moyens, la compétition 2011 est apparue de haute tenue. Des habitués qui venaient avec de vrais grands films (Kaurismaki, Moretti, Von Trier), des audaces couronnées de succés (les sélections de Drive, Police, The Artist ou Pater), quelques très beaux objets de fascination (signés Bonello, Ceylan, voire Malick) : une sélection digne, équilibrée, assez jouissive, dont le palmarès n’a pas totalement traduit la richesse.
Un certain regard
Regard trop souvent incertain (comme le montrent encore quelques films trop bien intentionnés, comme Et maintenant on va où ?), la sélection Un certain regard a su prouver cette année sa pertinence. Accueillant des auteurs inspirés (Dumont, Zviaguintsev, Van Sant, Guédiguian), réservant une étonnante surprise (Arirang), un poignant coup au coeur (Arrêt en pleine voie) et quelques coups de coeur (L’Exercice de l’État, Oslo, 31 août, Le Chasseur), la sélection 2011 ne se place plus simplement en parallèle de la compétition officielle, mais bien en véritable complément.
Semaine de la critique
Pour fêter son cinquantième anniversaire, la Semaine de la Critique s’est offert une année royale. Portée par le souffle de son film d’ouverture (La Guerre est déclarée), la section parallèle est parvenue à concentrer certains des plus beaux “coups” de ce festival : on y a assisté au retour de Jonathan Caouette, à l’explosion de Jeff Nichols, avec Take Shelter, et, parmi les premiers films, le sulfureux Les Crimes de Snowtown aura fait parler de lui... Cerise sur le gâteau : la Caméra d’Or attribuée aux beaux Acacias de Pablo Giorgelli.
Acid
De toute évidence, la programmation de l’Acid, cette année, n’avait pas, à une notable exception près, la puissance ni la variété de l’édition passée. On ne saurait le reprocher à l’association qui de ce point de vue, à l’image de n’importe quelle autre section, doit composer avec les films qu’on lui propose. Cela n’en reste pas moins regrettable face à un festival qui s’est montré dans l’ensemble d’une remarquable tenue. Par ailleurs, le collectif qui compose la programmation devrait peut-être se méfier, en version haute, d’un effet de signature, et version basse, d’un sentiment de répétition, de films un peu attendus : le film venu de banlieue, le documentaire paysan et ainsi de suite…
Contrechamp : Mon expérience de juré cannois
À Cannes, moi, j’avais le badge rose : le Graal de la Croisette ! J’y étais juré jeune. Nous étions sept, tous sélectionnés par le secrétariat d’État à la jeunesse et la vie associative. L’idée était de remettre le Prix de la Jeunesse à un film de la compétition, ainsi qu’un prix Regard Jeune à une première ou deuxième oeuvre présentée dans la section Un Certain Regard. Durant dix jours, nous avons donc visionné 34 films et disserté sur ceux-ci. Les débats furent évidemment houleux...