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Re-territorialiser l’espace public

par André-Louis Paré · trad: Bernard Schütze

Avec le déboulonnement de plusieurs monuments de personnalités controversées, les réclamations pour le changement de nom de rues ou de lieux publics ainsi que les protestations pour une juste reconnaissance des groupes minoritaires, l’espace public, associé à la démocratisation des échanges entre les citoyen.ne.s, est en processus de profondes modifications, voire de re-territorialisation,depuis quelques années.

L’art public à l’épreuve du vivre ensemble

par Laurent Vernet · visuels: Tiffany Shaw-Collinge, Rafael Sottolichio, Ludovic Boney, Nadia Myre

À Calgary, les automobilistes qui empruntent la route transcanadienne peuvent apercevoir, au pied du Parc national olympique du Canada, l’œuvre Triassic Towers de l’Étatsunien Del Geist.[...] S’inscrivant en continuité dans les recherches de l’artiste sur les sciences naturelles, l’œuvre – plus fréquemment appelée «Bowfort Towers» – tend à révéler des couches d’histoire locale. L’œuvre monumentale comprend quatre structures faites chacune de trois poutres d’acier intempérique (dit Corten) s’élançant en hauteur, à travers lesquelles sont disposés, comme s’ils étaient en flottement, des spécimens de Rundle Rocks, cette roche que l’on ne retrouve que sur le territoire provincial. La structure quadripartite découle d’une attention pour le nombre quatre, faisant ici référence à la culture des Nations Kainai, Piikani et Siksikas, qui forment la Confédération des Pieds-Noirs (en anglais : Blackoot Confederacy), l’œuvre se trouvant sur leur territoire traditionnel. Ce sont des sages Pieds-Noirs, dont Geist préférera taire les noms , qui lui ont présenté l’importance de ce nombre dans leur culture puisqu’il réfère aux quatre éléments, aux quatre saisons et aux quatre étapes de la vie.

Le monument dans un champ élargi : les pratiques performatives de Giorgia Volpe, Claudia Bernal et Constanza Camelo Suarez

par Analays Alvarez Hernandez · visuels: Giorgia Volpe, Claudia Bernal, Constanza Camelo Suarez

Figure solidaire d’une temporalité longue, de la sédentarité et de la solidité, le monument est au cœur de la tempête. Selon le philosophe français Régis Debray, ce qu’il qualifie de «monument-message» constitue une lettre adressée d’une époque à la suivante. Aujourd’hui, nombreux sont ceux à ne plus vouloir ouvrir cette lettre. En fait, certains souhaitent la déchirer, tandis que d’autres proposent de la réécrire. Aux allures de plus en plus planétaires, la contestation actuelle du monument reflète un malaise croissant à l’endroit de différents héritages coloniaux, totalitaires ou religieux . Au Canada, plusieurs monuments porteurs d’idéologies racistes, esclavagistes et génocidaires sont aussi sous la loupe médiatique, citoyenne et gouvernementale. Toutefois, bien avant cette crise monumentale, un autre phénomène, relativement méconnu du grand public et peu relaté par les médias, sévissait dans la sphère publique.

The Hackers of the Streets: Art, Networks and Post-Crisis Urbanity

par Bill Balaskas · visuels: Maurice Benayoun, Conor McGarrigle, EMST and Hackitecture, Julian Oliver, Éilís Murphy

The global financial crisis of 2008 gave birth to a new generation of political movements, which grew and flourished in streets and squares around the world. From “Occupy Wall Street” in the USA to “Indignados” in Spain, a range of anti-austerity protests, collaborative actions and participatory initiatives in public spaces reflected large parts of our societies’ need to find alternative modes of socioeconomic existence, which would prioritise social demands over economic ones.

Des praxis queer qui décolonisent les espaces publics

par Julie Richard · visuels: Kama La Mackerel, Cruising Queer Collective, Marsala Project

Lieu partagé du commun souvent abordé pour ses propensions unificatrices, l’espace public revêt une prétendue neutralité. Il est d’ailleurs illusoirement perçu comme un espace citoyen accessible et égalitaire pour tous, que l’on habite et parcourt à sa guise selon ses envies. La pluralité des manifestations politiques qui s’y déroulent semble toutefois réfuter de diverses façons cette conception libérale. Des groupes militants et des communautés culturelles l’occupent pour y faire valoir leurs revendications en matière de droits civiques – on n’a qu’à penser ici aux soulèvements engendrés par les mouvements Occupy et Black Lives Matter – ou encore en ce qui a trait aux droits des femmes et des identités LGBTQIA+. Autant de rassemblements qui appuient l’idée que, dans une société stratifiée, l’espace public constitue avant tout un espace dialectique et intersectionnel où les expériences individuelles sont multiples.

Coming Out of “The Death of the Monument”

par Martin Zebracki · visuels: George Segal, Karin Daan, Julita Wójcik

Lewis Mumford, in his 1937 essay “The Death of the Monument,” wrote that “the notion of a modern monument is a contradiction in terms; if it is a monument, it is not modern, and if it is modern, it cannot be a monument.” The statement of this American architectural critic not only reveals the temporal paradox inherent in monuments. In some way, this claim may have condemned some of the traditional ‘modern’ monuments to the dustbin of history. But there is some more dusting to do.

Villes résilientes et Slow Art : pratiques spatiales et artistiques au temps de la COVID

par Annie Gérin · visuels: Daily tous les jours, Daniel Rotsztain, Douglas Scholes, Marie-Andrée Gill, Marie-Claude Marquis

Avec le confinement et le travail à domicile qui s’est répandu, la géographie et la vitesse de nos villes ont changé. La ville, soudainement détraquée par le virus, a révélé sa matérialité et son organisation spatiale et temporelle. [...] Graduellement, à Montréal comme ailleurs à travers le Canada, un programme de piétonnisation a été mis en place, suivi de l’animation des espaces publics avec des activités artistiques et culturelles. Un rythme beaucoup plus lent, plus organique, s’est installé, comme si la société avait soudainement abandonné le fétiche moderniste de la vitesse et la suprématie de la vélocité, désignés « culture dromocratique » par Paul Virilio.

What Are Our Supports? A Conversation with Joni Low

par Karen Henry · visuels: Francis Cruz, Andrew Lee and Khan Lee; Germaine Koh and Aron Louis Cohen, with Russell Gordon; Emily Neufeld with Cease Wyss Huckleberry; S F Ho with Elisa Ferrari; DRIL Art Collective

What Are Our Supports? was a series of artist’s projects in public space in Vancouver during 2018, curated by Joni Low and co-presented by Or Gallery and Richmond Art Gallery. Five artist groups addressed this question of supports amidst current conditions of environmental, social, political and economic precarity. Germaine Koh, Aron Louis Cohen and Russell Gordon; Emily Neufeld and Cease Wyss; S F Ho and Elisa Ferrari; DRIL Art Collective with Elisa Ferrari, John Brennan, Justin Patterson, and Michele Helen Mackenzie; and Andrew Lee, Khan Lee and Francis Cruz responded with sensory-rich projects, approaching art in public space as a form of research, experimentation, incidental encounters and collective learning with unexpected publics.

Conversation épistolaire : Eunice Bélidor et Camille Larivée

par Eunice Bélidor, Camille Larivée · visuels: Kamissa Ma Koïta, Lindsay Katsitsakatste Delaronde, Cam

À la suite de l’invitation de Laurent Vernet pour une collaboration d’entretien pour ce dossier de la revue ESPACE, Eunice Bélidor a voulu discuter avec Camille Larivée, commissaire, artiste et directrice de la programmation du Collectif des commissaires autochtones vivant à Montréal/Tiohtià:ke. Après avoir accepté son invitation, et vu les présentes mesures d’isolement dû à la COVID-19, elles ont décidé d’en faire une conversation en format épistolaire. Afin de débuter cet entretien, Camille a envoyé à Eunice ces propositions de lectures : Take Back the Streets, une entrevue avec Camille dans le magazine Vie des Arts en lien avec sa résidence Wikipédia Art+Féminisme à Artexte ; le texte de commissariat du projet Nous ne sommes pas faits de briques et de poussière ; ainsi que des liens vidéo du projet Unceded Voices/Les Voix insoumises.

Amplifying Presence

par Devora Neumark · visuels: Kim Anderson, Lianne Leddy, Brittany Lub, Melissa Mollen Dupuis, Erik Escobar, Kamissa Ma Koïta, Leslie Komori, Parris Lane, Raul Zito, Nadia Myre, Tiffany Shaw-Collinge

The COVID-19 pandemic and surge of protests, vigils and healing walks demanding systematic—anti-racist and decolonial—change in the wake police killings of BIPOC has lent an urgency to the question of whose voices are amplified in public art. In a recent keynote address during a public art summit, acclaimed Chinese-Canadian artist and educator Ken Lum expressed how COVID-19 has brought to the surface the racism, injustice, and profound inequity that is currently endemic to our society.

Biennale nationale de sculpture contemporaine de Trois-Rivières : Croire

par Daniel Fiset · visuels: Moridja Kitenge Banza, ATSA, Janet Macpherson, Marilou Lemmens, Richard Ibghy, Charlene Vickers, Caroline Monnet, Joanne Poitras, Patrick Bérubé, BGL, JR

Le choix d’un thème pour une biennale d’art contemporain est un exercice relativement périlleux. Certaines sont affligées d’un sujet trop flou, laissant supposer que la sélection d’œuvres est guidée par un effet de mode plutôt que par une véritable réflexion de la part des commissaires; d’autres rendent les œuvres présentées trop illustratives, l’argument muséal ayant déjà tout dit à la place des artistes. Il en est tout autre de Croire, la neuvième édition de la Biennale nationale de sculpture contemporaine de Trois-Rivières présentée en août et septembre 2020. Évitant le piège de la naïveté que pourrait laisser supposer son titre, l’exposition remporte le pari d’être à la fois lucide et optimiste, utopique sans être innocente.

Victor Cicansky: The Gardener’s Universe

par Ray Cronin · visuels: Victor Cicansky

Clay has always been an important medium for sculptors, both as an intermediary stage in the casting processes, and as the finished object itself. Despite the category of ‘ceramics’ often being relegated to the fine crafts, and thus seemingly outside of a fine art discourse, many senior Canadian artists have consistently used clay as a sculptural medium, including Joe Fafard and Gathie Falk.

Bridget Moser: My Crops are Dying but My Body Persists

par Tak Pham · visuels: Bridget Moser

Toronto-based artist Bridget Moser explores this relationship between our body and our design-for-desire in a dream-like performance for camera, which is the main feature in the exhibition My Crops Are Dying but My Body Persists at Remai Modern in Saskatoon. In the artist’s first solo museum exhibition in Canada, visitors watch Moser for 21:57 minutes as she interacts with a selection of objects while contemplating topics of futility and failure, of confusion and loneliness.

Andrée-Anne Roussel et Samuel St-Aubin, Ce qui compte

par Nathalie Bachand · visuels: Andrée-Anne Roussel, Samuel St-Aubin

Avec l’exposition Ce qui compte, d’Andrée-Anne Roussel et Samuel St-Aubin – sous le commissariat d’Ariane Plante –, on nous parle avant tout de valeurs affectives et subjectives. Ce qui compte y est variable, souvent diffus et informe, potentiellement invisible et parfois même carrément inconnu ou, simplement, quelque part dans les limbes du pressenti. Ici, cela se compte d’abord en dix œuvres – vidéos et installations cinétiques ou génératives – qui se répondent les unes les autres à travers certains motifs récurrents ou mécaniques similaires. Certaines des œuvres ont par ailleurs été créées à deux têtes et quatre mains, et sont « signées » Roussel et St-Aubin.

Minia Biabiany, Musa Nuit

par Antoinette Jattiot · visuels: Minia Biabiany

Dans l’espace diaphane de la Verrière, l’exposition Musa Nuit est scindée délicatement par de nombreux fils de coton étirés du sol au plafond. Presque imperceptibles, ces brins de matière ainsi disposés par l’artiste Minia Biabiany nous convient à la rencontre d’une histoire de filiation, par le biais d’une réflexion sur l’identité et la sexualité de la femme guadeloupéenne. Dans l’installation, mêlant vidéos et sculptures, l’enjeu de cette investigation sur l’histoire du colonialisme à travers l’objet du corps ne réside pas dans la dénonciation, mais «dans une reconnaissance face à soi-même», permettant «de comprendre son identité à la fois comme une condition non figée et un sujet du travail artistique», explique l’artiste.

RELATIONS : la diaspora et la peinture

par Itay Sapir · visuels: Jessica Sabogal, Shanna Strauss, Manuel Mathieu, Curtis Talwst Santiago

Les expositions de groupe sous-entendent nécessairement des critères d’inclusion : pourquoi cet artiste et pas un autre, pourquoi ce corpus en particulier ? Quelles œuvres sont indispensables et desquelles peut-on se passer ? La définition et l’application de ces critères sont au cœur du travail commisarial. Parfois, les critères sont vagues et généraux, parfois hautement spécifiques; les expositions les plus exigeantes du point de vue de la théorie sont souvent celles qui sont structurées autour d’un concept. C’est le cas de Relations : la diaspora et la peinture, commissariée par Cheryl Sim. Contrairement aux apparences, ce n’est pas la notion fort vague des «relations» qui est au centre de l’exposition, mais celle, bien plus précise, théoriquement développée et historiquement située de la diaspora.

Clara Cousineau et Marion Paquette, Demi-mesure

par Alban Loosli · visuels: Clara Cousineau, Marion Paquette

L’Espace Transmission a été lancé le 10 septembre 2020 avec l’exposition Demi-Mesure du duo d’artistes Clara Cousineau et Marion Paquette. Ancien garage dénommé Transmission A-1 (2000) Inc., le lieu se caractérise par sa facture industrielle, brute et spacieuse, en s’inspirant visiblement des espaces alternatifs qui occupent une place de plus en plus considérable dans le monde de l’art.

Marie-Claude Lepiez, Tangerine Dream

par Gabrielle Sarthou · visuels: Marie-Claude Lepiez

Présentée au centre d’artiste Caravansérail, l’exposition solo de l’artiste Marie-Claude Lepiez, Tangerine Dream, nous fait voyager dans le passé à travers une esthétique grunge, brûlante, subversive, ludique, qui rappelle certainement la vibrance de la sorte de cannabis homonyme. Comme dans un cagibi, la juxtaposition de divers bibelots, textures et matériaux suggère diverses temporalités et participe d’une recontextualisation des objets, leur conférant un sens nouveau.

Andréanne Godin, Réconcilier ton absence m’était impossible

par Élisabeth Recurt · visuels: Andréanne Godin

Arpenter la galerie Nicolas Robert, lors de la dernière exposition d’Andréanne Godin, nous invite à sonder un état de deuil se référant directement à la nature. Tel que le poète et philosophe Henry David Thoreau, lui-même arpenteur à ses heures, n’en aurait pas renié le lien puisque, pour lui, la terre se définit comme une doublure de l’homme et par là même sa perte mène à une dénaturation humaine.

Charlotte Charbonnel, Geoscopia

par Camille Paulhan · visuels: Charlotte Charbonnel

Le travail que Charlotte Charbonnel présente actuellement à l’Abbaye de Maubuisson a été pensé bien avant la période dont nous faisons collectivement l’expérience. Mais il est singulier, alors qu’une potentielle menace parfaitement invisible nous entoure, de voir une artiste développer ses recherches sur ce qui nous traverse et que l’on ne voit pas. Ses œuvres sont à voir, mais aussi – et surtout – à entendre, à écouter, à guetter.

Ingrid Tremblay, Un raccourci par le désert

par Ariel Tremblay · visuels: Ingrid Tremblay

Bien que malheureusement écourtée en raison des mesures sanitaires du mois d’octobre 2020, l’exposition Un raccourci par le désert, d’Ingrid Tremblay, se présentait comme une oasis bienvenue en ces temps incertains. En montre à la Maison de la culture de Rosemont-La Petite-Patrie, l’exposition individuelle rassemblait un corpus de sept œuvres sculpturales réalisées au cours des quatre dernières années.

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