À moins d’être Robinson sur son île déserte, l’arrivée de la COVID-19, causant la crise sanitaire que l’on connait et le débat qui s’en est suivi, notamment sur son origine, nous a rappelé une évidence que l’on tend parfois à sous-estimer : nous vivons dans un monde où nos réalités, vécues au quotidien, finissent par se rejoindre. Bien que l’histoire récente du siècle passé nous ait déjà offert des expériences où le phénomène de la résilience fut, à chaque fois, éprouvé, jamais n’avons-nous partagé grâce, particulièrement, aux moyens des télécommunications et des réseaux sociaux, une situation nous offrant la vive impression que nous sommes toutes et tous «dans le même bateau».
Laboratoires
Penser laboratoire
En quête de vérité: les investigations de Forensic Architectur
Concept aux résonances multiples, l’agentivité – traduit de l’anglais agency – se fait de plus en plus présente dans les sciences humaines. Référant globalement à la faculté d’agir et d’influencer les événements et les êtres, le terme dénote la performance de nos actes intentionnels, voire une puissance d’action. Certains des pans les plus significatifs des théories qui en ressortent en philosophie et en psychologie abordent les catégories de l’agentivité individuelle, de proximité ou collective.
The Function and Dysfunction of Science: Artists Inside and Outside the Laboratory
Scientific laboratories immediately evoke an image of the scientist researching ways to regulate the disorderly world outside. However, the white-coated authority of the scientist might be an all-too-easy image to conjure. Since the turn of the century, several artists have sought to problematize and contextualize laboratory practices and the knowledge produced in them. In this article, I discuss a series of artworks that are either created in laboratories or use materials and images produced in them. By entering the scientific laboratory, the artists converse with contemporary scientific methods, sometimes even intervening in and complementing them.
Hicham Berrada: agent morphogénéticien
Nourri d’une double formation artistique et scientifique, Hicham Berrada, dont la pratique englobe l’installation, la performance et la vidéo, emprunte son modèle à celui de la recherche scientifique tant au niveau des méthodologies, des techniques que des approches. Il explore librement les réactions physiques des matériaux, leurs aspects formels et le maillage complexe des relations entre les éléments et les forces.
Shifting Vectors in the Transfer of Knowledge: Artists in Industrial Laboratories
Historically, a broadened concept of creative experimentation took place in the 1960s and has influenced artistic collaboration up until the present time. New material and social possibilities have been added to traditional techniques and spaces of artistic activity. Among other aspects, expanding the field of creativity has led to a rising mutual interest in the world of art and industry.
Variations sur le thème: paradigmes expographiques et laboratoires contemporains
Aujourd’hui, nombre de musées et d’autres espaces voués à la diffusion et à la présentation de l’art contemporain offrent au public des services variés, dédiés au partage de l’expérimentation et de la créativité collective. Ces initiatives découlent d’une tradition historique qui a vu l’image du laboratoire investir la culture épistémique de l’art et de l’architecture, en devenant souvent un paradigme de création et de recherche.
Le laboratoire contre les mirages de la science: un entretien avec Laurent Lamarche
Depuis plus de 10 ans, la production de Laurent Lamarche interroge le monde de la science en mimant son imagerie visuelle et ses dispositifs de laboratoire. Avec le plastique pour matière, il passe de la sculpture à l’image, se faisant tour à tour découvreur ou inventeur de spécimens qui, par leurs aspects, confondent les frontières entre le vivant et le non-vivant, l’organique et le technologique. De la science dont il épouse les formes esthétiques, l’artiste met cependant en doute son discours de vérité.
SenseLab: An Interview with Erin Manning
Erin Manning is a philosopher, cultural theorist, artist and professor at Concordia University where, in 2004, she founded SenseLab. Conceived as a polymorphic research-creation laboratory, SenseLab is comprised of an international and interdisciplinary network of artists and thinkers who work at the intersection of philosophy, art and activism. The aim of this interview is to gain insight into the experimental and dialogical approach inherent to this collective project.
Domus (Les résonnances des plateformes) : un entretien avec Massimo Guerrera et Sylvie Cotton
Initié par Massimo Guerrera en 2017 et développé en complicité avec Sylvie Cotton et 11 autres participant.e.s, le projet Domus prend des formes variées, avec un accent sur le dialogue performatif et langagier. Fondées sur des rapports croisés entre la maison comme corps et le corps comme maison, les séances de présentation devant public qui composent Domus ont principalement eu lieu chez Guerrera au fil des mois, mais aussi dans le cadre de la programmation de la Fonderie Darling à l’automne 2019. Cet entretien vise à suivre l’évolution de ce projet aux multiples échos sensibles.
Imagination as Instrument in Art, Science and Society
Let’s begin with the test-subject: a woman who sustained severe traumatic brain injury in a road accident, in the summer of 2005. After an initial comatose state, she opened her eyes and demonstrated cycles of sleep and wakefulness. But although “reflexive behaviour” was preserved, there was nothing which could be regarded as “voluntary” or “willed” responses… from the upper or lower limbs’; indeed, there were “no overt motor responses to command” at all. On the Glasgow Coma Scale—a standardized measurement designed to reliably and consistently assess how deeply an individual is comatose—she rated a lowly 4 out of 15: she was in a vegetative state.
Jusqu’ici tout va bien ? Archéologies d’un monde numérique
Après trois premières éditions respectivement sous le signe de la sensorialité, de la figure de la prosopopée et de la notion de hasard, l’exposition principale de la Biennale d’art numérique Némo propose cette année sa version des « archéologies du futur1 ». Empruntant aux méthodes du design spéculatif (ou design fiction), elle anticipe un scénario qui n’a a priori rien d’utopique, tout du moins d’un point de vue humain. En effet, l’extinction de notre espèce y est consommée, ce qui octroie aux oeuvres exposées, vestiges du genre humain, une valeur archéologique.
Eva Grubinger, Malady of the Infinite
À la fin du 19e siècle, le sociologue français Émile Durkheim introduit le concept d’anomie au sein des ouvrages De la division du travail social (1893) et Le suicide (1897). Il aborde, entre autres, cette notion sous la perspective d’un dérèglement social phasique; l’état d’une société où une absence de normes sociales mène éventuellement à une démoralisation de l’individu.
Spunkt art now
L’exposition Spunkt Art Now, accompagnée de la revue du même nom, regroupe onze auteurs/autrices1 et onze artistes du Québec, des États-Unis, de l’Espagne, du Danemark, et font suite à In A Post World : Post-Punk Art Now, une exposition présentée en 2016, accompagnée elle aussi d’une revue. Cette première exposition abordait la question de l’origine du mouvement punk, ses héritages idéologique et esthétique en vue de comprendre comment ce mouvement a pu influencer l’art actuel. La plus récente exposition et la nouvelle édition de la revue présentent des oeuvres et des textes qui revendiquent également une filiation punk par leur idéologie ou leur esthétisme.
Plaza Plays Place
Thao Nguyen Phan, Monsoon Melody
Monsoon Melody, la plus grande exposition à ce jour de l’artiste vietnamienne Thao Nguyen Phan, se dévoile comme l’architecture d’un opéra dont chaque décor accroché à un cintre défilerait au gré de l’histoire contée. Pour cette présentation au WIELS à Bruxelles, les oeuvres de l’ensemble des trois chapitres sont donc, pour la plupart, suspendues dans l’espace et dialoguent en diptyque, entre images animées (moving images comme l’artiste aime les appeler) et peintures.
Heidi Barkun, LET’S GET YOU PREGNANT!
LET’S GET YOU PREGNANT ! de l’artiste Heidi Barkun apporte une réflexion éclairante sur le thème de la fécondation in vitro. En donnant la parole à celles que nous entendons peu, l’artiste offre à ses visiteurs la possibilité de s’interroger sur le statut des femmes dans la société, ici sous le prisme de la maternité : pourquoi les femmes, considérées comme aptes à enfanter, seraient-elles dans l’obligation sociale, voire morale, de le faire ? Pourquoi, lorsque certaines d’entre elles ne le veulent ou ne le peuvent pas, sont-elles perçues comme moindres de ce qu’elles pourraient être ?
Amélie Laurence Fortin, Le cercle d’Arcadie
Sous les apparences se trouve une forme de réalité invisible. Et cette réalité invisible n’est pas nécessairement ce à quoi nous nous attendons, car lorsqu’on évoque l’idée d’apparence, on sous-entend que nous avons l’intuition de ce qui se trouve derrière ou dessous. Nous induisons, par cette allusion, que nous avons la quasi-certitude que les choses ne sont pas ce qu’elles sont en réalité. « The owls are not what they seem » – phrase emblématique de la série Twin Peaks de David Lynch – résonne comme une prophétie émergeant d’un monde parallèle.
Swan Song
It is always a pleasure to see Shary Boyle’s paintings and sculptures in a gallery space, rather than as photographs in a book, because her mythological, excessive artworks—particularly her sculptures—demand time and movement. With the small exhibition Swan Song, Projet Pangée has brought together the work of four female artists: Boyle (Toronto), Delphine Hennelly (Brooklyn), Annelie McKenzie (Los Angeles) and Claire Milbrath (Montreal). Encompassing only seventeen artworks in total, Swan Song is a carefully curated, implicitly feminist show that is premised on the concept of decadence in relation to both material and behavioural excess, and notions of decay and “inevitable” decline.
Caroline Cloutier, Variations
Connue pour ses agiles explorations de la stratégie du trompe-l’oeil, Caroline Cloutier dévoile dans l’exposition Variations, un corpus où elle s’approprie un langage plus pictural en s’éloignant de la forme installative souvent privilégiée dans son travail. Elle y déploie trois séries photographiques dans lesquelles on remarque l’introduction de la couleur, élément neuf dans sa pratique.
Crocodile Tears
We’ve been feeling, for a while, that things are not as they seem. Much of life is revealed as representation—as rituals drained of myth that we consciously or unconsciously perform. Aesthetics are complicit in masking corruption and deception. Identity is marketed to us as malleable and orchestrated constructs. Feelings have become manipulated, truncated, and weaponized as emotional currency in our algorithmic “experience economy.” If we feel it, is that an authentic experience? Yet, what remains of a direct encounter in a media-saturated, technologically determined existence, when these tools are now subsumed within?
Patrick Bérubé, En parallèle
La pandémie aura réservé un sort cruel à la toute dernière exposition En parallèle de Patrick Bérubé, mais aussi un contexte parfait. Cruel, parce que l’exposition n’aura vécu qu’une petite semaine, fermée avec le reste de la province à la mi-mars, puis condamnée à l’invisibilité pour respect inflexible du calendrier de programmation de la galerie Art mûr. Parfait parce que la proposition activait des fantômes, jouait sur le principe de perte, de révélation et de survivance. Elle semblait hantée et déjà prête à assumer sa légende d’exposition fantôme. L’exposition aura donc disparu presque aussi vite qu’elle s’est activée. Il restait alors à la faire revivre par le souvenir de son expérience, un mode d’existence qui lui convient, in fine, assez bien.
Mathieu Latulippe, Démesure et concessions
OEuvrant sur la scène artistique québécoise depuis plus de quinze ans, Mathieu Latulippe est reconnu pour ses projets conceptuellement riches qui se distinguent par l’usage fréquent de la maquette. Son exposition Démesure et concessions nous convie dans les revers de la promotion immobilière et de ses nombreuses déclinaisons. En évoquant les bureaux de vente du marché immobilier à l’aide de différentes formes de représentation architecturale, il a créé un univers spécifique au capital foncier, où les stratégies marketing se dévoilent de manière hyperesthétisées.