On leur a attribué des croyances sectaires et des châteaux, leur activisme aurait menacé l’Église même, mais qui sont réellement ces cathares ? Pensée et née avec la vie intellectuelle du XIXe siècle, cette hérésie médiévale fait aujourd’hui l’objet d’une approche entièrement réévaluée par les historiens et archéologues. Ce numéro des Dossiers d’Archéologie est l’occasion de découvrir la réalité du XIIIe siècle dans le Midi de la France, depuis les communautés de Bons hommes et Bonnes femmes jusqu’à la restructuration du territoire par la conquête royale.
Les cathares, une hérésie médiévale en question
Le “catharisme ” et l’histoire de l’hérésie médiévale
Les villages castraux, la noblesse et l’hérésie
Une approche sociologique des habitats fortifiés en Languedoc occidental et des registres de l’Inquisition fait apparaître la petite aristocratie locale comme l’acteur central de la diffusion des préceptes des Bons hommes. Pour combattre « l’hérésie », les villages castraux ont donc été la cible prioritaire de la croisade.
Cabaret de Lastours - Un castrum aux XIIe et XIIIe siècles
Le site de Lastours, dans la montagne Noire au nord de Carcassonne, est connu pour ses quatre châteaux royaux, dressés sur une longue crête rocheuse : Cabaret, Tour-Régine, Surdespine et Quertinheux. Autour d’eux, 35 campagnes de fouilles, menées de 1979 à 2014, ont mis en évidence des éléments bâtis du castrum de Cabaret, qui fut, de 1063 à 1229, le centre d’une importante coseigneurie minière brutalement abandonnée.
L’impact de la croisade sur les “Bons hommes » et « Bonnes femmes ”
Dès les années 1160, des communautés religieuses, dont les adeptes se nomment Bons hommes et Bonnes femmes, sont attestées dans le Midi de la France. Organisées en Églises autonomes et indépendantes, ces communautés sont installées dans les villages et bourgs fortifiés de trois principautés : comté de Toulouse, vicomté des Trencavel et comté de Foix. La croisade contre les albigeois(1209-1229) les ébranle profondément.
1240, Carcassonne ne tombera pas
Au matin du dimanche 9 septembre 1240, les habitants de Carcassonne voient se masser à proximité de leurs murailles une troupe de combattants dont ils reconnaissent les étendards. Raimond Trencavel, le fils du vicomte de Carcassonne décédé dès le début de la croisade contre les albigeois (1209), vient réclamer son héritage paternel et la ville que ce dernier avait perdue en 1226. Devenue centre administratif d’une sénéchaussée royale, Carcassonne avait été fortifiée, entre 1228 et 1239, par les ingénieurs de Louis IX. De quoi tenir tout assaillant à distance.
Carcassonne sous Louis IX - Genèse d’une citadelle royale
C’est l’une des plus impressionnantes places fortes d’Europe : plus de 3 km de murs fortifiés, une double enceinte concentrique, un château altier, des dizaines de tours et d’ouvrages portiers... La Cité de Carcassonne forme un complexe fortifié à nul autre pareil, rendu plus exceptionnel encore par son état de conservation actuel.
Les forteresses du Lys dans la sénéchaussée de Carcassonne
La croisade contre les albigeois, qui s’achève en 1229 avec la soumission du comte de Toulouse, élargit le domaine royal capétien jusqu’aux Pyrénées. Le royaume de France possède désormais une frontière avec le royaume d’Aragon. Dans les terres nouvellement acquises, le roi Louis IX lance un important chantier de modernisation de châteaux et crée un réseau de puissantes forteresses destinées à garantir la paix intérieure et à défendre le royaume.
Les châteaux du vertige - Une architecture adaptée
Puilaurens, Peyrepertuse, Quéribus, Montségur... Perchées au sommet de leurs falaises, ces forteresses que Michel Roquebert avait baptisées « citadelles du vertige » fascinent aujourd’hui pour la poésie de leurs ruines, qui semblent prolonger la montagne et s’accrocher aux nuages. Ces nids d’aigles ont longtemps été qualifiés de « châteaux cathares » auprès du grand public.
Peyrepertuse - Une forteresse royale à l’épreuve du temps
Il est le plus célèbre et emblématique des châteaux des Corbières. On l’a comparé à un vaisseau de pierre lancé à l’assaut du ciel, d’où son surnom de « Carcassonne céleste ». Avant d’être une ruine à l’incroyable pouvoir d’évocation, le château de Peyrepertuse – littéralement « pierre percée », sans doute en raison d’une arche dans le rocher qui n’existe plus aujourd’hui – fut une forteresse royale, créée dans les années 1240 sur le site d’un castrum préexistant.
Les châteaux de la sénéchaussée de Carcassonne de la fin du Moyen Âge au XIXe siècle
De la fin du Moyen Âge au traité des Pyrénées, les places fortes de la sénéchaussée de Carcassonne participent aux guerres incessantes entre les puissances française et espagnole. La paix revenue, elles tombent en déclin jusqu’à leur abandon pendant la Révolution. Au cours du XIXe siècle, elles sont redécouvertes par des écrivains et historiens issus du romantisme.
Les cathares d’un mythe à l’autre - Une histoire à l’épreuve de ses réinventions
Derrière le mot cathare se cachent plusieurs approches historiques, des mythes constamment réinventés et autant d’imaginaires. Quels sont les réels enjeux derrière les controverses qui divisent avec âpreté les historiens, derrière faux mystères et révélations frelatées dispensés aux amateurs d’ésotérisme, ou derrière les utilisations commerciales et idéologiques de ce phénomène avant tout médiéval ? L’existence des Bons hommes et Bonnes femmes met à rude épreuve l’équilibre entre histoire, mémoire et territoire.